En 2019, c'est grosse session mécanique sur mon RF5.
Depuis que j'ai l'avion, j'ai fait pas mal de travaux dessus (entre autre le remplacement des deux verrières, qui est un petit chantier), mais je me suis limité à démonter les culasses sans toucher au bas moteur.
Hors une fuite d'huile persistante par la boite d'accessoires faisait craindre une fuite par le joint spi de vilebrequin ou un carter fissuré (problème récurrent sur ce type de moteur), aussi les compressions étaient un peu faible sur une des culasse, à part ça il marchait correctement (en salissant mon aile).
Tant qu'à sortir le moteur, et immobiliser l'avion, autant refaire le tableau de bord avant et améliorer le refroidissement du moteur.
Si j'ai un peu d'équipement chez moi pour bricoler, je décide d'aller faire la révision du moteur en Italie.
Il y a là-bas Eugenio, de l'AVAG, dont j'ai fait la connaissance via le Club Fournier, qui connaît très bien ces moteurs et dispose d'un atelier de mécanique très fourni, avec notamment le matériel pour usiner les carters et les culasses.
Plus qu'à sortir la bête, et direction l'atelier de mécanique
Arrivé chez Eugenio, c'est parti pour le démontage de tous les accessoires : bougies, magnéto, carburateur, alternateur, pompe à essence et on les mets de côté pour faire leur révision individuelle (ou leur remplacement plus tard).
Démontage
On démonte la boite d'accessoires, on sort la poulie d'alternateur qui sert aussi à entraîner la magnéto, puis les rampes de culbuteurs, les culasses et les cylindres.
On enlève les clips et les axes et on sort les pistons, qu'on débarrasse de leurs segments.
Puis on sépare les deux demi-carters pour sortir le vilebrequin et l'arbre à came.
Nettoyage
Après le démontage, comme toujours en mécanique, vient l'heure du nettoyage. Pour ça, c'est un confort énorme d'avoir l'atelier d'Eugenio: il a un compresseur avec un bon débit qui permet de faire pas mal de sablage, et gros bac de chlorure de méthylène, du coup j'ai rapidement un beau résultat sur les pièces qui supportent ce traitement.
Pour les pièces qui ne supportent pas ce type de traitement, c'est essence ou diluant nitro.
C'est tout de suite plus facile de prendre des photos quand les pièces sont nettoyées.
Je commence par les culasses et les soupapes
Culasses côté cylindre, on voit quelques unes des modifications du L2000
Les cylindres, les inscriptions deviennent visibles
Ce sont des cylindres aluminium avec traitement Nikasil, donc pas trop de sablage à l'intérieur.
Un bon nettoyage ça facilite le remontage, plus facile avec le numéro de cylindre visible
Les pistons, en insistant bien sur les gorges des segments
Mais aussi sur les passages d'huile, côté bielles
Le numéro de piston est bien visible à présent
Le L2000 est dérivé d'un classique type 1 VW 1600 cc, du coup la flèche n'indique pas la direction de l'hélice mais celle du volant moteur (côté boite d'accessoires)
Volant moteur
Sur mon moteur les dents ne servent pas uniquement au démarreur, mais aussi au compte tour électronique (ce qui évite le classique câble)
Révision des culasses
Comme j'ai réusiné les sièges, je décide de faire le rodage directement avec du grain fin, j'y reviendrais...
La soupape en place sur la culasse, sa portée enduite de pâte à roder, on la fait tourner sur elle même avec une ventouse, un peu comme si on voulait allumer un feu avec du bois, tout en la décollant régulièrement en levant la ventouse. La soupape doit coller un peu quand on lève la ventouse, signe que le contact se fait bien sur toute la portée.
Ensuite il faut très bien nettoyer les culasses et les soupapes (j'utilise de l'essence puis du diluant nitrocellulosique dans un pistolet à peinture), pour enlever absolument toute trace de pâte à roder.
On peut alors attaquer le remontage.
Les soupapes en place, on retourne la culasse pour mettre en place les ressorts de soupapes. Ils ont un sens, le côté où les spires sont les plus serrées se monte côté culasse (à l'opposé des coupelles).
Je peux maintenant faire l'épreuve des soupapes. Je remet la bougie, je remplis les chambres de diluant nitrocellulosique ou d'essence (éviter l'eau), et j'y vais à la souflette dans les admissions et les échappements. Toutes les admissions sont ok. En ce qui concerne les échappements...
Des bulles sur les quatres (!!!) soupapes d'échappement, je redémonte donc tous les échappements.
L'explication vient du fait que les soupapes étaient récentes, donc j'ai décidé de les conserver. Comme j'ai usiné les sièges à la fraise, j'ai fait le rodage directement au grain fin, ça a bien marché pour les admissions qui n'étaient pas trop usés, mais pour les échappements qui s'usent plus le rodage n'a pas assez usiné la soupape (elle n'est pas passée à la fraise contrairement au siège).
Donc je refais le rodage au grain gros, puis nettoyage pour enlever toute trace de pate, à nouveau au grain fin, et tout est étanche.
Les deux culasses sont huilées un peu partout puis stockées dans des sacs de congélation pour une bonne conservation.
Révision du bas moteur et remontage
Il est maintenant temps de commencer à travailler sur le vilebrequin. Je démonte les bielles et leurs coussinets, qui seront remplacés comme toutes les pièces d'usure.
Si on est hors-côté, et que c'est à cause du faux rond de vilebrequin, il n'y a plus qu'à le remplacer : à cause du traitement de surface, on ne peut pas le ré-usiner.
Mais revenons à la mécanique, on poursuit avec l'extraction du flasque d'hélice. C'est là que l'aide d'Eugenio est utile, il a un extracteur spécial, utiliser un extracteur à griffes c'est la quasi-certitude d'endommager le flasque.
Depuis je me suis retapé un tour et je peux aussi me fabriquer mes extracteurs, mais c'est un peu de travail quand même.
Avec le pétard (clé à chocs) on ne galère pas à bloquer le vilebrequin.
Maintenant j'ai un tour mais pas de fraiseuse, alors pour faire ce genre d'outil c'est disqueuse et lime, ça marche aussi mais c'est long!
C'est parti pour le remontage. On va donc monter d’abord les clavettes, puis le coussinet (9), l’engrenage de l’arbre à cames (8), la rondelle d’espacement (7), l’engrenage de la pompe à essence (6), le clip, le second coussinet (4) puis la rondelle d’étanchéité (3).
Pour que les pions des coussinets (encadrés) s’insèrent correctement dans le carter, le trou doit toujours être placé côté volant moteur.
Chaque bielle se monte sur son cylindre (de 1 à 4 en partant de l’hélice vers le volant moteur). En alternant le sens des bielles tous les numéros de cylindre sont visibles (encadrés sur la photo), ce qui veut dire que si on retourne l’ensemble c’est toutes les frappes à froids pour appairer chapeaux et têtes de bielles qui sont visibles (pour vérifier que vous avez suivi!)
Je monte ensuite la pompe à huile.
L’étanchéité entre le corps de la pompe et le carter est faite avec le joint papier renforcé au Loctite 573 de chaque côté, serrage à 20Nm.
L’étanchéité avec le couvercle de la pompe à huile est faite par le film d’huile dans la gorge.
La peinture a séché pendant la nuit, on peut attaquer la suite.
On commence par monter le joint spi (pour ceux qui ont suivi j’avais monté le volant moteur, mais c’était juste pour ajuster le jeu axial du vilebrequin, je l'ai démonté pour la peinture).
Pour le montage des segments sur les pistons, le mieux c’est que le segment du bas (le racle-huile) soit coupé du côté « ciel » de l’avion en vol (pour les avions qui volent sur le ventre la plupart du temps), assez logiquement à cause de la gravité.
Donc dans mon cas la coupure se montera à l’opposé du numéro de piston.
Pour préparer les couples pistons et cylindres au montage on met un peu d’huile sur les pistions, on comprime les segments, on pose le piston avec l'outil de compression dessus sur le cylindre retourné et on tapote sur le piston pour faire rentrer tout ça bien dans l’axe.
Ensuite on monte un des deux clips de retenue d’axe et on rentre l’axe en partie de l’autre côté, et il n'y a plus qu'à faire glisser le cylindre jusqu'au carter.
Un peu de silicone haute température en bas de chaque cylindre, ensuite il n’y a plus qu’à faire rentrer la bielle, à pousser l’axe dans le pied de bielle puis monter le deuxième clip.
Les 4 cylindres en place, je remonte le volant moteur, la poulie d’alternateur et d’entrainement de la magnéto, et je freine les vis.
On n’oublie pas les tôles de refroidissement à monter avant les tubes enveloppes !
Ensuite, je mets en place les 4 tubes enveloppes, puis je monte la culasse et mets les 2 écrous du milieu (dans la partie sous le cache-culbuteurs).
Je serre légèrement et surtout positionne bien les tubes enveloppes, les tiges ne doivent en aucun cas risquer de toucher les bords.
Alors seulement je mets les autres rondelles et écrous (avec du silicone haute température sous les 4 rondelles qui sont sous le cache-culbuteurs).
Je fais le même travail sur l'autre culasse, et ensuite c'est la procédure de serrage au couple progressivement en alternant la culasse droite et gauche.
Après je monte les rampes de culbuteurs. Il faut vérifier que les culbuteurs n’appuient pas au milieu de chaque soupape mais légèrement désaxé (pour faire tourner la soupape). J’en profite pour faire le réglage des culbuteurs, qu'il faudra de toute façon reprendre après que le moteur ai tourné.
Après c'est le remontage de tout le reste…
Flasque d’hélice, tôle sur les cylindres et à l’arrière, bougies, câbles de magnéto, admissions, radiateur d’huile, commande de pas d’hélice, support de carburateur, démarreur, magnéto et alternateur, etc. Ca fait du poids tout ça !
Vous aurez noté les deux tubes carrés sous le moteur... Encore un coup d'Eugenio qui prévoit des supports pour transporter les moteurs dans les coffres de voiture sans avoir à les caler ;)
Et c’est parti pour le vol de contrôle. On n’oublie pas de mettre du pied à gauche, après tous ces vols en CAP10 dernièrement…
A 3000 tours stable 3 bars et 80°C à l’huile pour 10°C dehors, on peut voir que c’est le cylindre numéro 3 (pourtant devant le 4) qui est plus chaud avec 175°C contre 150°C pour le 4. Juste le ralenti à régler à l’issue du vol.
Merci pour ce gros travail avec les commentaires très précis. Bon vol.
RépondreSupprimerMerci pour ce gros travail avec les commentaires très précis. Bon vol.
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